Postée il y a 9 heures
Contexte de l’étude
L'un des principaux défis de l'humanité est de réduire l'utilisation des ressources fossiles pour l'énergie et la chimie, en privilégiant des filières plus durables. Si, pour l'énergie, de nombreuses solutions sont explorées, comme les centrales hydroélectriques, l'énergie solaire et éolienne pour la production d'électricité, la transformation de la biomasse en combustibles, l'hydrogène comme carburant alternatif, etc. ; pour la chimie, les recherches actuelles se concentrent principalement sur le développement de matériaux biosourcés alternatifs pour remplacer les polymères et les solvants, sans réelles solutions pour la chimie fine, encore basée sur des ressources pétrochimiques en voie d'épuisement. Cette situation constitue un handicap majeur pour l'industrie pharmaceutique, puisque plus de 80 % des molécules actives utilisées dans cette industrie sont d'origine aromatique.
Pour apporter une réponse partielle, ce projet se concentre sur la valorisation de coproduits riches en lignine issus des industries agroalimentaires ou papetières pour la production de composés aromatiques. Notre proposition vise à développer la valorisation chimique de ces ressources, issues des brasseries et papeteries, pour la synthèse de petites molécules aromatiques utilisables en chimie fine. Pour atteindre un tel objectif, des catalyseurs hétérogènes seront engagés dans une voie catalytique permettant de conduire la transformation de la lignine en unités C9-aromatiques.
En résumé, le projet vise à proposer de nouvelles voies de valorisation de la lignine contenue dans les coproduits des brasseries et des papeteries. Des méthodes respectueuses de l'environnement sont prévues pour réaliser la dépolymérisation de la lignine dans l'eau. Le recyclage des catalyseurs métalliques est également un objectif à atteindre.
Le défi consiste à trouver des systèmes catalytiques hétérogènes efficaces et sélectifs capables de transformer sélectivement la lignine en dérivés cinnamiques avec une sélectivité élevée et de bons rendements, de préférence dans des conditions respectueuses de l'environnement.
Activité et méthodologie
La valorisation de la lignine par dépolymérisation sélective (pyrolyse, dépolymérisation oxydative, acido-basique ou enzymatique…) fait l'objet de nombreuses recherches. La plupart de ces procédés conduisent souvent à de faibles rendements en produits à valeur ajoutée, généralement sous forme de monomères aromatiques en C6. Une étude récente montre que des phosphates d'aluminium dopés aux métaux de transition sont capables de convertir sélectivement la lignine en dérivés cinnamiques unités-C9 sous hydrogène. La sélectivité dépend fortement de la formulation du catalyseur et, en raison de la température de réaction élevée, les rendements restent faibles. Nous pensons qu'une meilleure maîtrise des propriétés acido-basiques et de la capacité d'hydrogénation des catalyseurs, grâce à la conception du catalyseur, pourrait permettre de parvenir à un procédé de conversion sélective de la lignine en dérivés cinnamiques dans des conditions douces (typiquement 25-100 °C, 2-20 bars d'hydrogène).
Pour relever le défi du projet, le développement de catalyseurs supportés sans métaux nobles sera engagé. Dans un premier temps, des catalyseurs à base de nickel seront évalués. Des matériaux phosphatés seront utilisés comme support, en commençant par des dérivés du nickel. Il est également prévu de préparer un système bimétallique utilisant une très faible charge en métal noble. Les techniques de caractérisation incluent l'analyse élémentaire, la microscopie électronique en transmission (MET), la spectroscopie par résonance magnétique (MEB), la spectroscopie par résonance magnétique (BET), la spectroscopie par résonance magnétique (DRX), la calorimétrie… Toutes ces techniques sont disponibles à l'IRCELYON ou à l'IFPEN, partenaire privilégié de l'étude.
Une fois entièrement caractérisés, les catalyseurs seront appliqués à la dépolymérisation de la lignine dans des réacteurs discontinus et triphasiques (tous disponibles à l'IRCELYON) en milieu aqueux sous atmosphère réductrice. L'accent sera mis sur la sélectivité de la réaction en unités C9. Les conditions réactionnelles seront optimisées.
L'effet néfaste de certaines impuretés sera étudié afin d'améliorer l'activité, la durée de vie et le rendement spatio-temporel des catalyseurs/réacteurs. Les mélanges réactionnels seront analysés par plusieurs techniques complémentaires, notamment la GC/GCMS, la LC/LCMS, la SEC en phase aqueuse, la RMN, la FTIR..., éventuellement après fractionnement, conformément aux rapports précédents. Des études cinétiques seront réalisées afin d'optimiser la réaction. Cela implique de suivre de près la composition du mélange réactionnel en fonction du temps afin d'en extraire l'évolution de la conversion des réactifs et celle des rendements en produits en fonction du temps. Des modèles cinétiques seront développés et simulés pour atteindre les constantes cinétiques.